CROWDSOURCING : VIVE LES MASSES LABORIEUSES !

Par PIERRE-JEAN BENGHOZI* | 2012-09-01

Chaque mois, un expert lit pour vous un essai non traduit qui fait l'actualité à l'étranger.
Jeff Howe, un des éditeurs de Wired, révèle ici un des changements majeurs accompagnant l'essor d'Internet : le crowdsourcing. C'est l'idée qu'on peut transformer les millions d'internautes en autant de contributeurs potentiels, à même de porter collectivement des projets jusque-là réservés aux seules entreprises capables de rémunérer des experts ou des équipes de spécialistes. Car le crowdsourcing permet de susciter des solutions émanant d'amateurs ou de spécialistes bénévoles travaillant pendant leur temps libre, tout autant que des contributions de PME ou d'experts initialement inconnus.
Popularisé par les projets open source, le crowdsourcing s'est rapidement étendu à de nombreux domaines : les contenus culturels, l'entrepreneuriat et le financement, les services aux entreprises. Désormais, il touche les industries les plus installées (cosmétique, pharmacie) et des champs d'application inattendus, comme la recherche scientifique participative.
A l'aide de nombreux cas éclairants, Jeff Howe établit ce qu'il appelle la force de la sagesse de la foule. Il analyse aussi les nombreuses manières dont ces foules peuvent être mobilisées : par le crowdsourcing proprement dit, ou par le crowdvoting, le crowdfunding, le crowdpurchasing, le microtravail ou les concours. La force d'une masse de contributeurs tient à la variété d'intelligence et de créativité qu'ils offrent, bien plus grande que celle d'un nombre défini d'individus ou de firmes spécialisées. Mais Jeff Howe nous montre que la foule n'est pas seulement talentueuse et créative, elle est aussi incroyablement productive. Il s'agit d'une méritocratie parfaite, où l'âge, le sexe, la race, ou le CV comptent moins que la qualité des réponses proposées.
Par sa force, le crowdsourcing a ainsi déclenché des changements radicaux dans l'organisation du travail, l'utilisation du talent, la recherche, la fabrication et la vente des produits. Mais en supplantant les formes traditionnelles de travail, il suscite des crises : déstructuration de secteurs d'activité - celui des agences photo face à des sites comme Fotolia ou iStockphoto, par exemple - et déflation des salaires, via les faibles rémunérations payées aux contributeurs.

Si de nombreux travaux soulignent l'importance des entrepreneurs et des équipes pour la performance des firmes, Jeff Howe démontre le pouvoir des communautés. Il occulte, cependant, le coût non négligeable de l'organisation du crowdsourcing pour une entreprise : fidéliser les contributeurs, formaliser les questions posées, recueillir et sélectionner les contributions, contrôler leur qualité, enfin les appliquer. Il ne se demande pas plus si la foule a le pouvoir de soutenir, dans la durée, la production d'une offre variée, notamment dans des secteurs pointus où le nombre des contributeurs est restreint. Ce faisant, l'ouvrage touche une faiblesse des théories actuelles du management qui peinent à articuler l'open innovation avec une gestion volontariste de la conception.

* Directeur de recherche au CNRS, il dirige le pôle de recherche en économie et gestion à Polytechnique (chaire Orange Innovation et régulation des services numériques).

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Parution : 281
2011-08-01 - «Samuel Brannan fit sûrement plus pour San Francisco et la Californie que tout ce que les meilleurs hommes auraient pu accomplir en réunissant leurs efforts » : c'est en ces termes que l'un des meilleurs historiens de l'Ouest américain, l'ethnologue Hubert Howe Bancroft rend hommage à ce mormon resté dans les annales comme le premier millionnaire californien. Ce commerçant roué et séducteur s'est enrichi non en creusant à la recherche d'or, comme de nombreux aspirants à la fortune, mais en vendant du matériel aux mineurs immigrés dans la région dès les années 1850. Il a ainsi pleinement su tirer parti de l'expansion de la zone, au point que sa carrière se confond avec la croissance de la grande métropole de l'Ouest. Entre 1846 et 1852, la population de Californie passe de 15 000 à 250 000 habitants. San Francisco, qui n'était jusqu'en janvier 1847 qu'un hameau endormi de 800 âmes, devient une ville dynamique de 35 000 habitants. Né dans le Maine en 1819, Brannan s'embarque à Brooklyn en 1846 avec 238 autres mormons pour échapper aux persécutions religieuses. Leur bateau passe par le cap Horn, fait escale à Honolulu et finit par atteindre San Francisco où il veut établir une colonie de mormons. A défaut d'accueillir le siège de l'Eglise de Jésus-Christ des saints des derniers jours - fondé à la même époque par un autre immigrant à Salt Lake City - San Francisco se civilise grâce à Brannan. En quelques mois, cet homme « aux traits insipides rehaussés de favoris à la mode, aux vêtements de dandy et au discours ampoulé » - selon le portrait qu'en dresse James A. B. Scherer dans - y crée un hebdomadaire, le , et une école. Il construit parallèlement un hôtel, un moulin et son premier magasin, implanté près de l'actuelle Sacramento, à Sutter's Fort.Tel est le nom donné par l'immigrant allemand John Sutter à son exploitation agricole. C'est là que, le 24 janvier 1848, le charpentier James Marshall trouve accidentellement de l'or en creusant les fondations d'une scierie. Quelques semaines plus tard, les hommes de Sutter proposent à Brannan de payer leurs achats en pépites. Le commerçant se rend compte de l'importance de la découverte, encore secrète, et se rend sur le terrain pour vérifier la présence d'or. Convaincu, il se précipite à San Francisco, y achète tout le matériel disponible en vue de le revendre avec une forte marge dans sa nouvelle boutique installée près du gisement. « Il arpente ensuite les rues boueuses de San Francisco en criant "De l'or ! De l'or ! Près de l'American River", agitant d'une main une ancienne fiole de quinine remplie de poudre d'or et de l'autre son chapeau », raconte Bancroft. Et annonce la découverte à la une du . La nouvelle se répand comme une trainée de poudre et déplace les foules. La Californie, qui ne gagne son indépendance vis-à-vis du Mexique qu'en 1848, n'a pas eu le temps de se doter d'une administration. Les terrains et l'or qu'elle recèle appartiennent au premier arrivé. Soudain, des milliers d'Américains empruntent de l'argent, mettent leur maison en vente, rassemblent leurs économies et partent profiter des nouvelles opportunités. Entre l'été et l'automne 1848, les deux tiers des habitants de l'Oregon abandonnent leur Etat. En un an, c'est toute la planète qui est mise au courant et débarque sur les lieux. « Entre 1849 et 1876, ils sont ainsi 111 000 à quitter le Céleste Empire, exposant pour la première fois la civilisation occidentale à cette puissante exportation asiatique qu'est le restaurant chinois », observe l'historien britannique Eric Hobsbawm. En 1850, arrivent entre 80 000 et 100 000 Européens. Le magasin de Brannan - le seul dans la vallée de la Sacramento - ne manque pas de clients. « Il réalise bientôt un chiffre d'affaires quotidien de 5 000 dollars », note Paul Bailey dans . Le commerçant participe à la spéculation immobilière qui fait rage dans la région. Des terrains qui, hier, ne trouvaient pas preneur, s'échangent entre 10 et 1 000 fois leur valeur. Brannan rachète tout ce qu'il peut à Sacramento, à San Francisco - il possède un cinquième de la ville en 1856 ! - et même à Hawaï. Pour diversifier son patrimoine, il investit dans une station thermale, dans les chemins de fer et dans les banques qui se créent dans la région (la Wells Fargo date de 1852 et la Bank of California de 1864). En 1857, la « Banque de Samuel Brannan », basée à San Francisco, garantit les dépôts des mineurs et des fermiers jusqu'à 450 000 dollars. Elle pratique des prêts au taux d'intérêt de 12% ! Brannan est l'homme le plus riche des Etats-Unis, avec 250 000 à 500 000 dollars par an de rémunération - il renonce d'ailleurs à la religion plutôt que de contribuer aux caisses des mormons ! Signe suprême de reconnaissance, il est élu au Sénat de l'Etat de Californie après avoir fondé les comités de vigilance, chargés de tenir à l'écart les immigrants indésirables - en l'absence de prisons, le sort qui leur était réservé était en général la pendaison. Malheureusement pour les affaires de Brannan, 1853 marque le début du déclin de la production aurifère - au total, jusqu'à l'épuisement des gisements en 1857, la région aura produit 750 tonnes, soit presque autant que celle du Brésil durant tout le xviie siècle. Un mineur indépendant qui gagnait 20 dollars par jour en 1848 n'en touche plus que 6 cinq années plus tard. Les plus visionnaires reviennent donc à leur métier d'origine : les cultures, très productives sous ce climat. L'agriculture transforme l'économie locale de manière bien plus durable que l'or... Malgré toute son ingéniosité, Brannan n'en profite pas plus que Marshall ou Sutter. Il boit, trompe sa femme. Lorsqu'elle obtient le divorce en 1870, c'en est fini de sa fortune. Il meurt à 70 ans près de San Diego, où il est enterré au cimetière de Mount Hope. Sur sa tombe sont gravés ces mots : « Sam Brannan : 1819-1889. Pionnier de la Californie. Rêveur. Meneur et constructeur d'empire. » Des dizaines d'écoles de Californie portent encore aujourd'hui son nom.

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Parution : 284
2011-11-01 - Depuis la disparition de Steve Jobs, Jeff Bezos a été élu « nouveau pape des valeurs technologiques » par la presse américaine. A 47 ans, l'opiniâtre patron d'Amazon continue son bonhomme de chemin aux commandes de la plus grande librairie de la planète, devenue, cet été, le site Internet le plus fréquenté au monde, devant celui d'eBay : 282 millions de visiteurs par mois, soit un internaute sur cinq, selon l'institut de mesure d'audience ComScore ! Malgré cette popularité, Jeff Bezos n'aime pas occuper le devant de la scène, contrairement à certains de ses confrères, flamboyants gourous de régulièrement chahutées par les crises. Pas plus qu'il ne s'affiche en tête des palmarès patrimoniaux. Bien que récemment enrichi, l'ex-trader prometteur passé des hedge funds aux livres n'est, avec 12,6 milliards de dollars, « que » le dix-huitième Américain le plus fortuné dans la dernière liste du magazine .La réussite d'Amazon est aussi complète que discrète. Le chiffre d'affaires de la société est passé de 4 milliards de dollars en 2002 à 34 milliards en 2010 (dont 44% à l'international) et devrait atteindre 47 milliards à la fin de l'année. En dépit de la crise, les ventes ont progressé en moyenne de 32% sur les cinq derniers exercices. « Cette société croît trois à quatre fois plus vite que les acteurs du e-commerce américains », s'exclame Olivier Vialle, expert vente au détail chez PricewaterhouseCoopers. Xavier Garambois, le patron d'Amazon France, avance une explication : « Dans de nombreux marchés, l'e-commerce part de si bas qu'il y a un effet de rattrapage. Et les prix inférieurs proposés sur Internet séduisent en ces temps difficiles. » Arrivée dans l'Hexagone en 2000, Amazon y a connu des débuts difficiles et n'y est certes pas aussi puissante qu'en Grande-Bretagne et en Allemagne, ses deux marchés clés en Europe. Mais elle a imposé son image de marque, devenant même l'enseigne préférée des Français, ex æquo avec Picard, si l'on en croit le récent classement du cabinet de conseil OC&C. Dix-sept ans après son lancement, le premier libraire mondial continue d'offrir à ses 137 millions de clients internationaux un catalogue incomparable de livres, mais plus uniquement dans leur version physique... Depuis avril, Amazon vend en effet 105 ouvrages électroniques pour 100 imprimés. « Aujourd'hui comme hier, sa force est de pouvoir vous expédier un best-seller commandé la veille en un clic de souris, comme de vous dénicher l'ouvrage rare à l'autre bout du monde », constate, admiratif, Bertrand Chovet, directeur du bureau parisien du consultant en marques Interbrand. Mais Amazon propose bien d'autres choses (voir encadré ci-dessous) : des grille-pains, des Lego, des pneus, des jeans, des couches... et surtout les fameuses liseuses Kindle, l'article le plus vendu par Amazon au niveau mondial - le parc total devrait atteindre les 18 millions à la fin de l'année ! Depuis quelques semaines, la France peut à son tour en profiter au prix très attractif de 99 euros. « Amazon concurrence à la fois eBay, Carrefour et Google, via ses services aux particuliers et aux entreprises », résume Olivier Vialle. Avant d'attaquer frontalement Apple avec sa tablette numérique Kindle Fire, qui est sortie le 28 septembre aux Etats-Unis et ne vise rien moins qu'à rivaliser avec les 29 millions d'iPad en circulation. Bien qu'Apple écrase le marché américain (82% des tablettes vendues), la dernière-née d'Amazon qui fonctionne sous Android - le système d'exploitation de Google - a son prix pour elle : 199 dollars. Avant d'en arriver là, Jeff Bezos a prouvé sa résistance à la critique. Longtemps, Wall Street n'a pas cru à son projet révolutionnaire de vente de livres en ligne, même si le produit s'y prête : il n'est pas périssable et reste assez léger pour limiter les frais d'envoi. « Fin 1994, lorsque Bezos crée Amazon, l'e-commerce n'existait pas vraiment et très peu de gens disposaient d'une adresse e-mail », rappelle Rhymer Rigby, auteur des (Dunod). Après l'introduction réussie au Nasdaq en 1997, les investisseurs ont reproché à Jeff Bezos de tarder à gagner de l'argent. Ce n'est qu'au début de 2002 - au lendemain de l'explosion de la bulle Internet - qu'Amazon a annoncé un très léger profit, sept ans après son lancement dans un garage de Seattle. Elle n'estdevenue bénéficiaire qu'en 2004. Google n'a, par comparaison, dû attendre que trois exercices avant d'atteindre son seuil de rentabilité.« La persévérance est la qualité de Bezos, raconte Rhymer Rigby. Contrairement à de nombreux créateurs de , il a pris le temps de réfléchir à ce qu'il vendait et d'élaborer un plan solide de développement à long terme. C'est pourquoi Amazon occupe cette place incontournable dans l'univers d'Internet alors que beaucoup de start-up créées à l'époque ont disparu. » Malgré sa diversification, son image reste associée au livre, bien que celui-ci se présente de moins en moins sous la forme papier. Encore marginal en France et en Europe du Sud, le livre numérique a déjà conquis le monde anglo-saxon. Les Etats-Unis tout d'abord, puis la Grande-Bretagne et l'Allemagne où la Kindle est respectivement arrivée à l'été 2010 et au début 2011. Sa liseuse a permis à Amazon de capter 60 à 70% du florissant marché du livre électronique aux Etats-Unis et jusqu'à 90% en Grande-Bretagne, selon l'institut britannique Enders Analysis. « Sortie en novembre 2007 aux Etats-Unis, la Kindle a vraiment fait décoller ce marché grâce à son prix - 114 dollars dans la version la plus populaire - et la disponibilité des best-sellers en format numérique », analyse James McQuivey, du cabinet américain Forrester Research. Les contenus, eux aussi, sont abordables là où le prix du livre n'est pas réglementé (Etats-Unis, Grande-Bretagne). Sur les 950 000 e-books actuels au catalogue de la Kindle, 790 000 coûtent moins de 9,99 dollars. En permettant au d'être en promotion sur la liseuse en juin dernier, l'éditeur Open Road a remis au goût du jour l'ensemble de l'oeuvre de William Styron. Dans un autre genre, les vieux thrillers du Gallois Ken Follett connaissent un regain de popularité car les fans de son dernier roman acquièrent les titres anciens en version numérique. Stieg Larsson, James Patterson et Michael Connelly font, quant à eux, partie du « Kindle Million Club », la douzaine d'auteurs à avoir vendu plus de 1 million d'exemplaires sur la liseuse. « Face à la numérisation du livre qui aurait pu menacer son fonds de commerce, Amazon a eu une réaction remarquable. Elle n'a pas tenté d'y résister en insistant sur le papier, comme l'a fait le libraire américain Borders qui en est mort. Elle a pris la tête de cette révolution en sortant un outil et des contenus attractifs », résume Jez Frampton, directeur monde d'Interbrand. Le potentiel de croissance est énorme. Aux Etats-Unis, 6,4% des dépenses de livres viennent du numérique, contre 5% au Royaume-Uni (chiffres Futuresource Consulting). Le marché du livre électronique y représente 966 millions de dollars par an et devrait tripler d'ici à 2015, selon Forrester Research. Au grand dam des libraires traditionnels qui, en France comme en Espagne - où Amazon a débarqué avec fracas en septembre -, crient à la concurrence déloyale. Des craintes ravivées par les récents efforts d'Amazon pour étoffer ses contenus. Aux Etats-Unis, Tim Ferriss, le gourou du développement personnel, a accepté de lui réserver son prochain ouvrage, , qui sortira en avril 2012 en format papier et numérique... Et le prête à Jeff Bezos le projet de lancer une bibliothèque en ligne, permettant aux abonnés de faire des emprunts illimités et garantissant aux éditeurs des conditions plus favorables que celles d'Apple. La direction ne commente pas. « Le but ultime est de proposer du contenu numérique dans toutes les langues et dans tous les formats, sur tous les marchés où nous sommes déjà présents et ceux qui restent à développer », se borne à affirmer Xavier Garambois. Avant de glisser : « La question n'est pas de savoir si, mais quand, cela sera possible et selon quelles modalités. » En écho à la formule fétiche de Jeff Bezos : « Têtu sur la vision mais flexible sur les détails. »

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Parution : 286
2012-01-01 - Clayton M. Christensen, professeur à la Harvard Business School, est spécialiste de l'innovation de rupture, ses sources, formes et applications. Avec deux collègues, enseignants de stratégie et de leadership, il signe un ouvrage tiré d'années de travail en commun sur les origines des idées innovantes. Avec près d'une centaine d'entretiens auprès des plus grands - Jeff Bezos, Michael Dell, Ratan Tata -, le trio cherche à repérer les spécificités de ces personnalités d'exception, non pas pour en faire l'apologie béate ou critique mais pour mieux mettre en évidence les caractéristiques des innovateurs parmi les entrepreneurs et managers. Nos trois experts ès innovations analysent cinq compétences singulières. Appelons ceci - pour synthétiser - le modèle Aqore, sigle tiré de la première lettre de chacun des termes désignant une de ces compétences. Associer : les innovateurs parviennent à connecter difficultés, questions et idées issues de domaines qui ne sont pas forcément liés. Questionner : ils s'interrogent et invitent à s'interroger sur ce qui est communément admis (et posent plus de questions qu'ils n'apportent immédiatement de réponses). Observer : ils scrutent les comportements des consommateurs, des fournisseurs et des compétiteurs afin d'identifier de nouvelles manières de faire. « Réseauter » : ils aiment rencontrer des gens d'horizons variés, ce qui permet de tester des idées. Expérimenter : innover c'est faire des expériences variées et en tirer des leçons. Engagé de manière cohérente sur ces cinq dimensions, le modèle Aqore permet, selon ses promoteurs, de soutenir une « pensée associative » qui autorise de nouvelles entreprises, de nouveaux produits, services et procédés. A la différence de ce que suggère le titre du livre, ce n'est pas seulement dans l'ADN qu'il faut rechercher les qualités de l'innovateur. La créativité et la capacité de mobiliser ont une dimension cognitive, mais être innovant serait aussi affaire d'organisation et de manière de faire. Dit autrement, il pourrait y avoir davantage d'acquis que d'inné quand il s'agit de s'organiser pour innover. Les lecteurs sont d'ailleurs invités sur le site connexe (http://innovatorsdna. com/) à faire des tests pour s'évaluer. Comme le suggérait le célèbre slogan d'Apple, il faut certes penser différemment, mais aussi agir différemment, pour faire la différence.Best-seller de la littérature , ce nouvel opus sur l'innovation a des prétentions théoriques et pratiques. Nous faisant voyager à l'intérieur de Virgin, Amazon ou Google, il se présente comme un véritable guide pour innover. On y traversera en réalité bien des lieux communs, mais aussi des réalisations à travers la multitude d'exemples, de citations et d'illustrations qui en font la richesse. Un des grands enseignements, au-delà du schéma proposé, est que nous pouvons tous tenter de mieux aménager notre temps pour innover, mais que le point crucial, pour une institution, est de repérer les innovateurs et de leur faire une place singulière. Ce qui est impossible pour tout le monde... * Professeur associé à Sciences Po (master d'urbanisme). Dernier ouvrage paru : (Odile Jacob, 2011).

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